Haïti
agonise … faute de Considération et de Respect
Au nom
du libre-arbitre, on ne saurait demander à une personne d’être patriote ou
nationaliste, mais on peut à bon droit la contraindre de prendre son pays au sérieux
et de le respecter. D’ailleurs, c’est le but primordial de certaines lois sur la
répression des comportements déviants et c’est surtout la mission de l’éducation
civique et citoyenne qui, malheureusement, a disparu dans le cursus scolaire haïtien.
Ce respect du pays, que l’école et les mass-médias devraient sacraliser, a été jeté
en pâture et on lui a même substitué la sacralisation de l’individu, justement
parce que c’est une thématique plus vendable au niveau international et, sur
laquelle d’ailleurs, les adeptes des droits humains ont fait leur beurre. Ce détournement
du respect dû au pays a engendré des dégâts immenses au sein des sociétés du
tiers-monde et y a provoqué une prolifération d’organismes-marchands qui font
des individus des demi-dieux et les ont investis de tous les droits, … sans
aucun devoir. Et puis, on s’étonne qu’au sein de ces sociétés – comme celle d’Haïti
– les gens s’adonnent beaucoup plus à la contemplation de leur nombril et au
culte démentiel de leur petit moi, en oubliant qu’il y a un bien commun à
construire qui s’appelle pays. Cela est vrai, tant pour le commun peuple que
pour les dirigeants. Et le pire est qu’au vu et au su de tout le monde, toute une
mécanique d’individuation[1]exclusive
de la notion du bien-être a été instituée et, au lieu d’être combattue tant par
les dirigeants que par les dirigés, elle a été vertement revendiquée et farouchement
défendue …dans la négation même du bien-être collectif.

Vous
comprenez les raisons pour lesquelles l’emballage politique des droits humains l’affranchit
d’un certain nombre de bonnes choses et le vide de son essence fondamentale,
c’est-à-dire de son contenu social et économique. Pour s’en convaincre,il
serait bon de se demander, de sang-froid,à quoi ça sert de militer pour les
droits politiques des pauvres alors que leur état de pauvreté est déjà une négation
flagrante de leurs droits socio-économiques ?Cette forme de militance déjantée
qui accepte le fait d’être pauvre comme une réalité indémontable, pour pouvoir
construire un droit politique là-dessus, est en soi une supercherie. C’est
vraiment de la poudre yeux et il ne faut pas s’étonner que ces discours sans
substance n’aient aucune efficacité dans la quête du progrès pour le pays. Ils
n’ont produit aucun résultat, ni politique, ni social, ni économique. Rien que
du bruit ! En toute bonne
conscience, il faut comprendre qu’il y a donc un recentrage à faire pour que
toutes ces questions relatives à la dignité humaine (qui doit aller de pair
avec le respect sacré du pays) puissent retrouver leur vraie place. En tout et
pour tout, il est indispensable de rendre primordial l’honneur du pays, à défaut
de pouvoir demander à tout le monde d’être patriote ou nationaliste.

Quand le
pays ne fait que plonger dans les profondeurs abyssales et que tous ses
clignotants sont au rouge, il faudrait croire qu’il y a une demande massive
pour des dirigeants compétents et des élites économiques ou politiques qui ont un
sens élevé de sacrifices. Malheureusement, comme pour priver le pays de tout
espoir de renouveau ou de progrès, un système est mis en place pour que ce soit
uniquement des crétins et des jouisseurs impénitents qui ont accès aux espaces
de pouvoir et de prises de décisions. Au nom du peuple et de la sacro-sainte démocratie,
un banditisme pluriel est légitimé et est en passe de devenir systémique ou se
convertir en un aspect congénital du système politico-économique haïtien. Comme
de fait, les dirigeants pensent que, pour avoir gagné des élections de quelque
manière que ce soit, ils ont le plein droit de concevoir le pays comme leur
chasse-gardée ou leur butin de guerre. Démocratiquement et de plein droit, ils s’imaginent
avoir le droit de vie et de mort sur les citoyen(ne)s et la patrie commune. Ils
se croient détenteurs de pouvoir sur tout, tout étant exonérés de toute forme de
responsabilité envers la société. Oui, des tenants de pouvoir qui ne sont
responsables de rien du tout et qui se plaignent à longueur de journée ;
comme si les complaintes étaient une forme de résultats socio-économiques et un
signe de performance politique. Cette exonération de facto les autorise à rouler
tout le peuple dans la farine, en évoquant des faux-fuyants et en zézayant sans
scrupule sur les problèmes d’énergie, d’insécurité, d’infrastructures, de
logements sociaux, de cherté de la vie et de l’effondrement du pays et de sa société.
Jean Bertrand Aristide, en son temps,
se confortait dans la formule populiste Analphabète-pas-bête et il a su poser
les bases idéologiques pour que René Préval mette en branle un pan-alphabétisme ou
un vaste mouvement qui a porté au parlement, dans les ministères et les municipalités une
kyrielle d’idiots ;… des gens sans lecture ni écriture. Des monstres dotés de
tous les pouvoirs, mais qui sont incapables d’élaborer et de faire voter une
proposition de loi, de reformer et de faire fonctionner une entité ministérielle
et encore moins de gérer une collectivité territoriale.
De la même
manière, des poches de banditisme ont été mis en place et dont on justifiait,
avant-hier, l’existence par les inégalités criantes qui prévalent dans la société.
Pourtant ces chiens enragés localisés dans les bidonvilles qu’on laissait pulluler
sous le sobriquet de ‘baz-rèd’ n’étaient que des as d’atout politique
que le pouvoir en place mobilisait à souhait pour se reproduire et se perpétuer aux
timons des affaires. Avec le temps, ces hommes lourdement armés se sont imposés
et ont imposé l’omerta dans leurs zones respectives. Et puis, on s’interdisait
de les combattre ou de les réprimer sous le ridicule prétexte d’un refus de
créer des dommages collatéraux. Il avait fallu le ‘dechoukage’ systématique
du régime prevalo-lavalassien du pouvoir par la famille Clinton, pour que ces
poches de banditisme se légalisent ouvertement et changent de patrons. On est passé,
en un tour de main, d’un pan-alphabétisme à un pan-banditisme (ou une fédération
des groupes armés) et, tout cela, dans le mépris et l’irrespect total du pays.
Ainsi, au nom d’un realpolitik criminogène et d’une velléité ténébreuse de se
maintenir au pouvoir, les dirigeants se moquent d’Haïti, monétisant sa pauvreté
pour s’enrichir, et méprisant son peuple et sa société pour se mettre en valeur
auprès des puissances occidentales.
Dans la même
veine, les manitous du système financier haïtien se croient vivre dans une tour
imprenable et cela leur donne le droit de pratiquer, sans retenu, un banditisme
financier féroce … sans être inquiétés. Leur intouchabilité n’est pas le fruit
du hasard, elle provient du fait qu’ils se sont toujours arrangés pour financer à
coup de millions de dollars les candidats les plus médiatisés (par une presse
qu’elle contrôle en majeure partie) et une fois la présidence mise en captivité
ils ont les coudées franches pour porter leurs poulains aux conseils de la BRH,
cette entité régulatrice en captivité depuis plus d’un quart de siècle. Tout
cela se fait, avec la complicité et le graissage de pattes des sénateurs, ces
chefs sans étique que la constitution a consacré co-dépositaires de la
souveraineté nationale. Dans ces genres de combines effectués en amont, les
organismes de défense des droits humains feignent toujours de ne voir
absolument rien, puisqu’ils se contentent de préférence de pleurnicher en
aval, quand les effets de système se manifestent dans la violence quotidienne ou
se traduisent par des assassinats et des enlèvements fomentés par les maîtres de
ce jeu qui se joue en hauts lieux, … loin des yeux et des oreilles indiscrets.
C’est tout
ce montage systémique qui nous vaut, de nos jours, une gourde sur-dévaluée
faisant plaisir aux bailleurs qui ont conçu la mise en place du Parc Industriel
de Caracol, car la viabilité d’un tel projet dépendra pendant longtemps d’une espèce
de dumping financier, capable de sécuriser la marge de profit des investisseurs
étrangers. Pour vous en convaincre, demandez-vous seulement combien d’ouvriers
ces derniers pouvaient payer avec 1,000.00 US$ en 2010, et combien peuvent-ils
payer de nos jours avec ce même montant ? Et, comment serait leur marge de
profit si le dollar s’échangeait encore au taux de 40 pour 1 ? Dans ces
conditions, il serait illusoire de penser que cette réalité puisse s’améliorer
sans déclencher un vaste mouvement visant à apprendre aux jeunes générations la
nécessité de prendre Haïti au sérieux. Il n’est pas normal qu’en 2020, on ait
une constitution qui laisse le champ libre à n’importe quelle tête-brulée pour
s’accaparer légalement du pouvoir politique, avec le financement obscur de
patrons malveillants du système financier national. Seules des arguties enrobées
d’un discours axés sur la sacralisation de l’individu (au détriment du pays) et
les droits humains peuvent amener quelqu’un à la conclusion qu’un idiot-jouisseur
a le plein droit de diriger cette Haïti malade et qui a besoin de médecins spécialisés à
son chevet pour se rétablir. Bref, pour empêcher que les spéculateurs du
système financier continuent à perpétuer leur logique de prédation sur l’économie
nationale, il n’y a pas 36 solutions, il est nécessaire d’accepter l’évidence
technique que n’importe qui ne peut pas être président, sénateur, député et
maire. Et, pour cela, il faut prendre le pays au sérieux …à défaut d’être
nationaliste ou patriote.
Les
directeurs d’opinions, eux-aussi, ont un geste sacré à faire s’ils veulent être
effectivement utiles à ce pays qu’ils disent tant aimés. Il est vrai qu’un
média est une entreprise commerciale qui vit de ses rentes publicitaires, mais
cela ne saurait justifier les dérives que l’on constate aujourd’hui dans le
monde de la presse. En vérité, il est difficile de comprendre qu’un média, pour
avoir une audience massive, soit obligé d’étoffer sa programmation d’émissions à
scandales. De la même manière, il est difficile de convaincre un esprit sérieux
que, pour survivre économiquement, un média doit se résigner à vendre des
ragots, des mensonges et des buzz de mauvais goût.
Dans le même
ordre d’idées, on arrive difficilement à comprendre les raisons pour lesquelles
un journaliste accepte de tendre son micro à quelqu’un qui profère des propos
incendiaires et néfastes pour la société et le pays. Vous me direz peut-être
que l’individu en question a le droit de la libre-expression comme tout le
monde, mais je vous répondrais que le respect du pays et de sa société, dans globalité,nous
oblige de voir au-delà de cette individuation des choses. La réalité haïtienne a
voulu toujours que ce soit la personne qui fait le plus de bruit qui
parvient à s’imposer en leader politique, mais dans cette galère, les médias devront
assumer une lourde responsabilité qui consiste en ce qui suit : la démocratie
est un régime de majorité, et quand, au sein d’une population, il y a plus beaucoup
plus de gens ayant une propension à faire le mal pour diverses raisons, la démocratie–
par le biais de cette masse maintenue dans la bêtise - peut se convertir en régime
du malin et de méchanceté où triomphent uniquement les déviants et les
délinquants, si les mass-médias ne prennent garde aux gens qu’ils imposent
comme modèles à la société. Encore une fois, pour la survie de société, tous les
directeurs d’opinions devront faire l’effort pour prendre le pays au sérieux …
En dehors de cela, pas de salut. Les méchants de tout poil et les bandits
légalisées ou légaux auront encore de beaux jours devant eux. A bon entendeur, … salut !
Gary
OLIUS
Auteur de :
« Haïti, malade
de son système financier et de sa bureaucratie fiscale » Editions C3
« Propension
à la Corruption, Aux racines de la corruption » Editions C3
[1] Individuation est un terme de la
psychologie analytique utilisé pour la première fois par le spécialiste Carl
Gustav Jung. Il traduit une voie individuelle de réalisation personnelle.
On vient de loin et on est encore plus loin. Sous toutes formes. Pousser des cris d'indignation cher écrivain, vous êtes en partie l'espoir de ce pays. Bonjo
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