Ayiti, entre la Covid-19 et la politique d’autruche de l’État


Ayiti, entre la Covid-19 et la politique d’autruche de l’État

La Covid-19 prend de plus en plus de terrain. Le nombre de cas s'accroit à un rythme fulgurant. Entretemps, les mesures de restriction s'intensifient. Plus de trois (3.000.000.000) milliards de personnes sont confinées à travers le monde. De plus, ailleurs, dans les différentes contrées, les dirigeants s'inscrivent dans une dynamique de renforcement de leurs structures sanitaires et de surveillance non seulement à travers la construction ou l’aménagement de nouveaux centres hospitaliers mais aussi au renforcement  du personnel de santé au niveau de ces structures. Mais, ici en Ayiti les dirigeants semblent ne pas voir ou saisir le danger qui plane sur ce pays ou attendent-ils peut-être que le Corona frappe plus fort.

En effet, le 19 mars 2020, le président de la République d’Haïti, Jovenel Moïse a annoncé les deux premiers cas de contamination de la Covid-19 dans le pays et a annoncé du même coup une série de mesures restrictivestendanced'empêcher la propagation de la maladie sur l’étendue du territoire. Ces mesures sont, entre autres, la suspension temporaire des activités scolaires et universitaires, la fermeture des ports et aéroports à tout transport de passagers, la cessation de toutes activités de la sous-traitance, l'interdiction de tout rassemblement de plus de dix personnes.

Cependant, environ quinze (15) jours après, on ne constate quasiment aucun changement. Bon nombre d'églises continuent, paisiblement, à mener leurs activités. À portail Léogâne, l'une des plus importantes stations d’automobiles du pays ne prend aucune pause. On peut le constater, dans les tap-taps, dans les bus, les passagers sont entassés comme des sardines. Les marchés publics fonctionnent comme à l'ordinaire. Dans les rues de la capitale les gens vaquent normalement à leurs activités.

Dans l'intervalle, la Covid-19 a connu une certaine propagation relativement faible. En effet, on a toujours tendance à minimiser les données chiffrées puisque l’ignorance semble régner partout, même au niveau de l’équipe dirigeante qui parait trop occupée à autre chose. Toutefois, les pays les plus touchés comme les États-Unis, l'Italie, l'Espagne, la Chine, la France sont tous passés par ce stade d contamination à petits chiffres.

Les autorités haïtiennes, après avoir annoncé ces dispositions, auraient dû être les premières à donner le ton. Or, étonnamment ce sont elles-mêmes qui ont offert le spectacle de mauvais goût, dénoncé par plus d'un, au champ-de-mars pendant plusieurs jours. Lequel spectacle consiste à mettre des gens à la file indienne pour récupérer leurs cartes d'identification délivrées par l'Office Nationale d'Identification (ONI), dans un contexte aussi fragile, inadapté et inapproprié. Qu'est-ce qui explique cet empressement? En tout cas, ça parait bizarre que nos autorités se contredisent elle-même.

Ce qui est évident c'est que maintenant on est devant un fait accompli. Il n'est plus question du stade I et II de la pandémie de la Covid-19. Les dirigeants haïtiens, fort malheureusement, n'ont pas su retarder ou empêcher l'arrivée  de la Covid-19 dans le pays en raison de leur laxisme et la facilité énorme avec laquelle ils lui ouvert la porte. Que peut-on faire, pour arrêter le mal déjà fait ?
 Ce qui est sûr, c'est que cette campagne de sensibilisation initiée au niveau des médias (radios et télévisions) et des réseaux sociaux parait inefficace et non suffisante pour plusieurs raisons. D'abord, la majeure partie de ces médias ne couvre pas toute l’étendue du territoire. Ensuite, certaines familles ne possèdent même pas d’écouteurs. Certes, certaines en possèdent mais elles ne peuvent l'alimenter en énergie pour des raisons quelconques. Donc, il faudrait une autre approche de sensibilisation pour empêcher la transmission et les cas de contamination rapide de la Covid-19.

C'est navrant! Mais, il faut le signaler. L'avenir s'annonce sombre et difficile si l'on tient compte de la défaillance du système de santé en Ayiti. Des pays qui ont des infrastructures sanitaires solides et adéquates n'ont pas pu tenir tête face à la Covid-19. Est-ce que le pays sortira vainqueur? Ce n'est pas évident. Sauf un miracle peut-être. A ce que l’on sache les fidèles croyants prient beaucoup en temps de confinement... Les dirigeants ayitiens se contentent, à longueur de journée, de rassurer la population Ayitienne avec des mesures insignifiantes et sujettes à caution. Cette attitude n'aura d'autres résultats, dans les jours qui viennent, qu’un désastre et alimenté par une catastrophe humanitaire si les autorités ne changent pas d’attitude. Toutes les conditions sont réunies pour déboucher sur une crise inouïe. Peut-être que Dieu écoute encore nos prières.

Selon un rapport du Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) en date d'avril 2012, dans l’Étude des conditions générales de détention dans six (6) prisons civiles du pays, stipule que : « La quasi-totalité des prisons civiles en Ayiti sont congestionnées ». Les cellules contiennent un nombre excessivement supérieur par rapport à la normale. Ce surencombrement cellulaire ne fait que provoquer une dégénérescence hygiénique au niveau de la population carcérale. De 2012 à nos jours rien n’est amélioré sinon que la détérioration du système carcéral en Haïti. Par conséquent, le risque de propagation est extrêmement élevé, avec cette réalité, si par hasard il y aurait un cas de contamination. Aussi étonnant que cela puisse paraître les dirigeants semblent ne pas mesurer l'ampleur de ce risque.  Faut-il signaler au passage qu’il y a certaines actions de désengorgement des centres carcéraux qui sont entreprises par les autorités judiciaires bien que tardives et insuffisantes.

De plus, les enfants de rue comme l'une des catégories les plus vulnérables du pays sont livrés à eux-mêmes. Aucune mesure d'accompagnement n'est adoptée par les responsables pour protéger cette couche précaire et fragile. Outre les enfants des rues, il y a également ceux et celles qui sont dans les différents centres d'accueil. De surcroît, il y a les personnes âgées ou faisant partie du troisième âge dans le pays se trouvant dans les maisons de retraite et les asiles communales qui évoluent dans une situation difficile.

L'heure est vraiment grave! Elle n'est plus aux promesses mais plutôt aux actions concrètes. On est en présence d'une situation exceptionnelle. Une situation qui mérite d'être adressée avec plus de célérité et du sérieux. Il nous faut des mesures urgentes et ponctuelles si l'on veut réellement limiter les dégâts. À cette situation exceptionnelle, il doit y avoir des mesures exceptionnelles. Si dans les périodes antérieures quand un pays était frappé par une catastrophe, nombre de pays l'ont secouru, tel n'est pas le cas aujourd'hui, hormis certaines institutions financières internationales et quelques rares pays qui sont prêts à intervenir au nom de la solidarité internationale. Car, cette épidémie est une crise mondiale. Aucun pays n’est exempt. Ceci dit qu’Ayiti ne peut pas trop à titre d’aide et de soutien. Mais on le sait tous, a moins que nos dirigeants montrent leur coté malin et intelligent pour en trouver. Nous savons déjà de quoi ils sont capables.

 Il n'est point un secret pour personne qu'ils  affichent une attitude laxiste en ce qui a trait à la gestion de l'épidémie Covid-19. A combien de spécialistes a-t-on fait appel? Combien de respirateurs, de masques, de cache-nez, de gants disposent les autorités? Au cas où il y aurait un véritable déferlement de la Covid-19, combien d'hôpitaux, de lits, et de centres d'isolement ont-ils placé dans le pays? Autant de questions qui ne font que nous donner une idée globale de la situation et renforcer nos doutes et inquiétudes.

C'est dans un tel contexte aussi inquiétant et préoccupant que les autorités font montre d'une telle irresponsabilité et inaction. Donc, pour palier à cette absence remarquable de l'État, il ne tient qu'à chacun d'adopter des mesures de précaution et de s'inscrire dans une dynamique participative et citoyenne. Ne serait-ce que dans l'optique de réduire le risque de contamination. Car, si l'on s'appuie sur ces dirigeants on risque de s'enliser dans un labyrinthe et faire suite au proverbe Ayitien qui dit : « Pa pran medsin sou kont pentad mawon ».

Lesly LOUIS, Étudiant à l'INAGHEI
Département Sciences Politiques, relations internationles
 Tél: (+509) 3350-8618
 louislesly09@gmail.com


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