Le révisionnisme historique
n’est pas en soi une démarche illicite, lorsqu’il consiste à apporter un éclairage
nouveau sur certains évènements du passé en fonction de nouvelles preuves
authentiques. La difficulté survient seulement lorsque certains gouvernements ou
courants de pensée cherchent délibérément à manipuler ou instrumentaliser les
faits afin de se donner le bon rôle dans l’histoire ou de discréditer un fait
historique avéré, en raison de motivations purement fantaisistes ou
subjectives. À un moment où le révisionnisme historique de type « négationniste
» devient justement un outil de la politique étrangère de certains pays, nous
nous proposons dans ce texte de mettre à nu leurs différentes formes d’expression,
en nous basant sur un exemple d’application concret, celui de la France vis- à-vis
d’Haïti.
I.- Le révisionnisme
historique comme outil de contestation des tragédies du passé
Utilisée à l’origine pour
qualifier la démarche de ceux qui étaient favorables à la révision du procès du
capitaine Alfred Dreyfus, condamné à tort en 1894 pour acte de trahison envers la
France, la notion de « révisionnisme » donne lieu à l’heure actuelle à deux interprétations
: l’une « critique » et l’autre « négationniste ». Dans la logique méthodologique
critique, le révisionnisme consiste en une démarche scientifique de l’historien
tendant à réviser perpétuellement le savoir historique par rapport à
l’explication traditionnelle d’un fait, sur la base de nouveaux éléments de
preuve discordante… Dans le sens négationniste, le concept de révisionnisme
s’entend plutôt d’une rhétorique discursive jugée illicite, cherchant à
contester, nier ou détourner une réalité historique pour des raisons idéologiques,
notamment nationalistes ou racistes.
En effet, depuis la fin de la
Deuxième Guerre mondiale, l’antisémitisme a été le terrain le plus fertile pour
les discours et la littérature révisionnistes de type «négationniste ». Qu’il
s’agisse des auteurs, tels Robert Faurisson, Arthur Robert Butz, Fred Leuchter,
G. Rudolph, Mark Edward Weber (…), tous ont cherché en commun à déconstruire
dans l’imaginaire collectif le visage réel du nazisme, en rejetant
catégoriquement l’authenticité de l’histoire de la « Shoah ». Dans cette
optique, les auteurs révisionnistes soutiennent en général quatre thèses
négatrices de l’holocauste, dont :
-La thèse de la « Solution
finale territoriale » : qui tend à expliquer que la « solution fiale »
évoquée par les nazis dans les discours et les documents n’était pas physique,
mais plutôt territoriale, dans le sens qu’elle ne concernait que l’expulsion
des Juifs en direction de l’Est européen. À ce titre, là où l’histoire officielle
parle d’extermination, les négationnistes parlent de préférence de « refoulement »
;
-La thèse du faible nombre
des victimes juives : Elle tend à démontrer que le nombre des victimes
juives du nazisme est beaucoup moins élevé que les chiffes traditionnellement
retenus. Ainsi, le nombre de ces victimes seraient tellement faible qu’il
n’aurait pas pu être assimilé à un cas de génocide. Pour les négationnistes, la
surévaluation du nombre des victimes du nazisme n’est due qu’à la propagande
juive ou russe ;
-La thèse des chambres à gaz
à désinfection : elle cherche à promouvoir l’idée que les chambres à gaz
étaient destinées à un usage sanitaire, plutôt qu’à perpétrer des homicides.
Dans cette optique, les adeptes du négationnisme nient carrément l’existence
d’une intention criminelle nazie et préfèrent au contraire justifier la
présence de ces chambres à gaz par des nécessités d’hygiène, notamment celle
d’assurer en permanence la désinfection de l’espace carcéral, dans le but de
prévenir la propagation d’épidémie parmi les déportés ;
Le révisionnisme historique: les stratégies de la France
vis-à-vis d’Haïti
-La thèse des fours crématoires post-mortem : elle tend à justifier l’utilisation des fours
crématoires seulement pour l’incinération de cadavres, plutôt que pour l’assassinat
prémédité des groupes de déportés juifs. Dans ce contexte, le négationnisme nazi
considère les fours crématoires comme un simple moyen destiné à gérer de
manière plus efficace les corps des individus décédés naturellement. Autant
dire, pour cette école révisionniste de type négationniste, le prétendu
génocide des juifs n’est rien d’autre qu’un énorme mensonge historique qui a
permis, à travers la propagande médiatique des alliés, la réalisation d’une
gigantesque escroquerie politico-financière, au profit exclusif des visées
sionistes des juifs sur la Palestine. Évidemment, la rhétorique des tenants du
négationnisme hitlérien n’est pas la seule doctrine révisionniste de type
raciste qui tente de détourner de manière illicite la vérité historique, en
cherchant à nier la réalité « d’Auschwitz » ou à atténuer la responsabilité du
nazisme dans l’horreur de la Seconde Guerre mondiale. Il existe aussi
malheureusement dans certains pays d’autres courants de pensée dominants qui
emploient systématiquement la pratique d’instrumentalisation politique de
l’histoire, afin de porter atteinte au devoir de mémoire de l’humanité.
Vous trouverez la suite de cet
article dans le prochain Numéro...
Me. James Boyard
Diplômé de l’ENA et de la Sorbonne
Enseignant-Chercheur à l’Université d’Etat
d’Haïti
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